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Télétravail : 5 spécialistes vous éclairent

Une cartographie intelligible

À l’heure où le télétravail a fait couler beaucoup d’encre depuis 1 an en raison de la crise sanitaire, nous avons dressé une cartographie intelligible du télétravail avec l’intervention pour la partie droit social d’Emilie Zieleskiewicz du Cabinet Z&A Avocats, ainsi que Maître Yves Fromont.

Suivi d’une étude d’implantation avant et après covid, initiée par Elyans, spécialiste d’aménagements de bureaux, en partenariat avec la société Tims dans son rôle d’utilisateur, spécialiste en solutions télécoms et informatiques dédiées pour l’entreprise.

Z&A Avocats

Maître Emilie Zieleskiewicz

18% des salariés en télétravail en novembre, 13% actuellement.

Le message actuel du gouvernement est clair : 100% de télétravail quand les métiers le permettent face à la pandémie actuelle.

Le télétravail doit être la règle pour l’ensemble des activités qui le permettent.

Il doit être de 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l’ensemble de leurs tâches à distance. Toutefois depuis le 6 janvier 2021, un salarié peut demander à revenir en présentiel un jour par semaine maximum, avec l’accord de l’employeur.

Dans l’instruction qu’elle vient de diffuser aux inspections du travail le 3 février dernier, la Direction générale du travail réaffirme très clairement que lorsque les tâches sont télétravaillables, elles doivent être télétravaillées. Le recours au télétravail peut être total si la nature des tâches le permet ou partiel si seules certaines tâches peuvent être réalisées à distance.

Quels risques pour les employeurs qui ne jouent pas le jeu du télétravail ?

À ce jour, il n’existe aucune sanction spécifique attachée à la non mise en place du télétravail du type une amende pour chaque salarié concerné qui ne télétravaille pas.

Pour autant les employeurs qui ne jouent pas le jeu du télétravail prennent des risques car l’obligation de mettre en place le télétravail n’est pas une simple obligation de moyens mais peut devenir en pratique une véritable obligation de résultat :

– ainsi, le manquement de l’employeur a l’obligation de sécurité (obligation de résultat) peut conduire jusqu’à la reconnaissance de la faute inexcusable si un accident du travail ou une maladie professionnelle intervient.

Or lorsque le Covid-19 a été contracté par le salarié dans le cadre du travail, le caractère professionnel de l’infection au Coronavirus peut être reconnu.

Par ailleurs, l’État vient d’annoncer une mobilisation particulièrement soutenue de l’inspection du travail dans les semaines qui viennent afin de remobiliser les entreprises suite à une baisse constatée du télétravail. L’idée est d’abord d’accompagner les entreprises et les partenaires sociaux mais aussi de contrôler le respect des mesures de prévention dont fait partie le télétravail et d’utiliser des « outils de coercition » si besoin tels que :

> la mise en demeure ;

> le référé judiciaire.

Les inspections du travail devraient ainsi prendre contact avec les entreprises spécialement dans les secteurs où le télétravail est plus particulièrement applicable (cabinets d’avocats, de comptabilité, fonctions support du secteur bancaire et des assurances, secteur de la communication, etc.).

La vérification de la mise en œuvre du télétravail pour toutes les tâches télétravaillables sera aussi systématique lors de tout contrôle de l’inspection du travail. Les conditions d’information et de consultation du CSE seront également vérifiées. En effet, l’instruction du 3 février 2021 rappelle qu’il importe que le CSE soit associé non seulement à la définition des tâches télétravaillables mais également aux modalités pratiques par exemple pour ajuster les horaires.

Manquement à l’obligation de sécurité, mise en demeure, ou encore délit d’entrave , ce sont les risques encourus en lien avec le renforcement des contrôles auxquels les entreprises doivent s’attendre dans les prochaines semaines.

Post Covid, le télétravail demeura une option et les entreprises doivent réfléchir à inscrire le télétravail dans un cadre plus pérenne après une mise en place massive en 2020.

Il conviendra d’adopter un formalisme proportionné aux besoins de l’activité et un cadre ajustable.

Il existe un faible encadrement du fait de la loi et l’accord national interprofessionnel du 20 novembre 2020 procède par voie de recommandations.

Il y a donc une large place laissée au dialogue social et à la concertation avec les collaborateurs.

Il est pertinent d’évaluer les avantages et les inconvénients à mener certaines activités à distance (déplacement, gain de temps, efficacité).

Plus qu’un métier entièrement télétravaillable, il est préférable d’identifier les fonctions susceptibles d’être télétravaillées et de s’entendre sur les critères d’éligibilité au télétravail.

La dynamique mise en œuvre dans le cadre des principes de prévention de la COVID-19 devrait permettre aux entreprises de réfléchir aux modalités d’organisation du temps de travail et du lieu de travail, afin d’alterner des activités télétravaillées et d’autres en présentiel.

Point de vigilance

Maître Yves Fromont

► Les conditions de travail à domicile peuvent renforcer les inégalités.

L’employeur peut proposer des alternatives au télétravail chez soi en définissant des conditions de recours aux espaces de travail sur d’autres sites de l’entreprise, ou dans des espaces de coworking extérieurs ou inter-entreprises.

La notion de lieu de travail est totalement bouleversée cela nécessitera d’adapter les procédures internes aux entreprises en matière de déclaration d’accident du travail et des réserves éventuelles à émettre auprès des caisses.

► Sur le temps et la charge de travail, il convient d’adopter un contrôle mesuré.

Le contrôle du temps de travail connecté ne dit pas grand-chose du travail réel effectué par les salariés à distance.

Il convient à notre sens de déterminer les horaires de joignabilité adaptés en prenant en compte les temps d’activité, de coordination et de travail tout en rappelant le droit à la déconnexion et éviter tout risque de sur-connexion.

Plus que des horaires de travail il s’agit de contrôler l’amplitude d’activité.

Un management en évolution

En outre, un véritable travail doit être effectué sur le rôle des acteurs et sensibiliser les managers sur les modalités d’animation à distance dans de bonnes conditions afin d’éviter des défauts de communication et de régulation, une surcharge informationnelle, des tensions ou des compétitions dans le collectif voire une situation de surengagement.

Au-delà de la dotation informatique pour télétravailler il faut apprendre à travailler ensemble à distance via une sensibilisation du management de proximité afin de conserver une performance économique tout en améliorant les conditions de travail.

Implantation avant et après covid des entreprises

Julien Scapaticci – TIMS

La société Tims a fait une étude d’implantation avant et après covid sur le Green Factory Lyon 9ème, immeuble de bureaux certifié NF HQE ; réhabilité par la société Arioste, opérateur spécialisé dans la réhabilitation d’immeubles tertiaires.

Bruno Cazenave – ELYANS

Cette crise sanitaire amène de nombreuses sociétés à revoir leur organisation générale, parfois de bousculer le management en interne et de mettre en place de nouvelles mesures.

Tous ces différents mouvements dans une entreprise peuvent être améliorés par l’aménagement intérieur.

Les lieux de travail sont repensés. Les flex office, le coworking ou encore le télétravail sont des solutions qui répondent à l’évolution de notre société et à ce besoin de « bien-être » au travail. Les codes de l’habitat sont ainsi donc de plus en plus amenés sur ces nouveaux lieux de vie.

Dans l’état d’urgence la solution du télétravail a été la plus déployée afin de palier à ces conditions de sécurité. Cependant nous en observons très rapidement les limites et les contraintes.

Les bureaux d’aujourd’hui et de demain, doivent donc pouvoir recevoir leur effectif à 100% sans mettre en danger leurs collaborateurs.

ETUDE DE CAS – PLANS

Immobilier tertiaire

François Fromont – City Real Estate

Que pensez-vous du télétravail au sens large ?

« La crise sanitaire a bouleversé bon nombre de choses et notamment le fonctionnement de nos vies professionnelles. Le télétravail, peu répandu avant 2020, prend aujourd’hui une place importante dans le mode de fonctionnement des entreprises. Il faut cependant faire le point sur cette pratique qui possède de nombreux atouts mais également certains inconvénients. »

La qualité de vie au travail représente-elle un engagement des employeurs auprès de ses collaborateurs ?

 » L’adaptabilité des bureaux est devenue primordiale afin de pouvoir accueillir l’entièreté des collaborateurs en toute sécurité. Ce genre de démarche s’inscrit toujours dans une volonté d’améliorer le cadre de vie au bureau. Effectivement, le bien-être au travail représente une priorité absolue pour les employeurs. Cela se concrétise notamment par la création de différents espaces comme des salles de détente, des mini-salles de sport, des salles de repos, etc. En effet, la qualité des locaux devient aussi un véritable outil de recrutement. »

La crise a-t-elle remise en question l’importance du bureau dans les entreprises ?

« Dans un souci d’économie, il serait dommageable que les sociétés, de façon trop précipitée, réduisent leurs surfaces de bureaux. Alors que si nous revenions à une situation normale, les entreprises pourraient être rapidement confrontées à des problématiques d’espace.
Si on prend en compte le coût d’un déménagement, l’engagement de l’entreprise dans un bail commercial et par ailleurs le recrutement de nouveaux effectifs, l’entreprise devrait alors déménager à nouveau pour retrouver un équilibre au sein de ses locaux, in fine l’addition pourrait être salée. Avant de s’engager dans une telle démarche l’entreprise devrait dans un premier temps repenser l’aménagement de ses locaux pour mieux appréhender la période post-covid. »

Le télétravail est-il adaptable à tous les secteurs et à toutes les entreprises ?

« Nous nous sommes aperçus, lors de nos dernières transactions de 2020 à aujourd’hui que le télétravail n’a pas le même impact selon les activités des entreprises, en effet certains métiers demandent plus de présentiel alors que d’autres ont plus de facilité à exercer à distance. Cependant, le travail à distance offre-t-il des conditions adéquates à tous les salariés ?
Exemple : pouvons-nous demander à un jeune salarié de travailler 2 à 3 jours par semaine dans un T2 ? Dès lors, l’employeur devra-t-il faire le nécessaire afin d’offrir des conditions de travail favorables au domicile de ses salariés ? »

Mais alors, quels sont les avantages du télétravail ?

« D’un point de vue mobilité, le télétravail permet aux salariés de réduire considérablement leurs déplacements.
Certaines entreprises commencent à louer des espaces de co-working à mi-chemin entre la société et le domicile des télétravailleurs. Ce nouveau mode de fonctionnement peut permettre également à certaines activités de recruter dans des départements limitrophes et voir même à l’étranger. »

Et après la crise, qu’adviendra-t-il du télétravail ?

« Post Covid, le télétravail sera une option à prendre en considération pour les recrutements mais aussi pour conserver les bons éléments.
Les employeurs devront également repenser leurs méthodes de management vis-à-vis des télétravailleurs. »

L’immobilier tertiaire est-il en danger ?

« Non, vous l’aurez compris le télétravail offre des atouts indéniables dans le fonctionnement des entreprises mais suscite aussi des inconvénients.
Quoi qu’il en soit le lieu de travail reste la meilleure vitrine pour l’entreprise, mais aussi un lieu d’échange indispensable. L’immobilier tertiaire à toujours su s’adapter et se réinventer. »